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BULLETIN.

ANALYSES CRITIQUES.

Études sur la langue bechuana, par Eugène Casalis, missionnaire français à Thaba-Bossiou, dans le pays des Bassoutos. - Paris, à l'Imprimerie royale. 1841.

Depuis plusieurs années, des missionnaires envoyés par la société des Missions protestantes de Paris se sont établis chez les naturels de la colonie anglaise dụ Cap de Bonne-Espérance et dans la Cafrerie. Ils y ont fondé des écoles, et ont amené à un certain degré de civilisation des peuplades jusqu'alors entièrement sauvages; ils se sont livrés avec le plus grand zèle à l'étude des langues indigènes, et ont fait imprimer dans ces idiomes la traduction de quelques-uns des livres saints, soit à la ville du Cap, soit à Graham's-Town. Quoique l'ouvrage de M. Casalis soit principalement consacré à la linguistique,

il renferme cependant des renseignements très-importants sur ce pays, si peu connu jusqu'à présent.

«< Le pays des Bechuanas, dans l'Afrique méridionale, s'étend au nord-est de la colonie du Cap de Bonne-Espérance, entre la Cafrerie proprement dite et les Hottentots, jusqu'à une distance considérable dans l'intérieur de ce vaste continent. Moins intelligents et moins guerriers que les Cafres, mais aussi plus actifs et plus habiles que les Hottentots, les Bechuanas semblent tenir le milieu entre ces deux races. Ils se divisent en plusieurs tribus, qui toutes parlent la langue bechuana. Les principales sont : les Barolongs, les Batlapis, les Baharutzis et les Bassoutos. Ces derniers, chez lesquels M. Casalis a séjourné sept ans, habitent la contrée comprise entre les montagnes Blanches, à l'est, et le Calédon, à l'ouest,

» M. Casalis et son compagnon M. Arbousset quittèrent Paris au mois de février 1833, débarquèrent au Cap, et se rendirent de là à Philippopolis, près des sources du Garup, où ils apprirent que Moscheh, roi des Bassoutos, désirait depuis longtemps des missionnaires pour civiliser sa nation. Il envoya deux cents bœufs au grand maître des blancs, afin d'obtenir de lui, en échange de ce troupeau, des hommes en état d'instruire les noirs. Ces bestiaux furent enlevés par des Korannas; mais ce revers ne découragea pas Moscheh. Il chargea de sa commission un certain Griqua, habitant de Philippopolis, qui était venu chasser sur ses terres, Griqua à

son retour en fit part aux missionnaires français, qui ne tardèrent pas à se rendre à cet appel. Moscheh leur fit le meilleur accueil, et leur fournit les moyens de s'établir d'abord à Morija, et ensuite à Thaba-Bossiou, sa résidence. Ces deux stations exercent leur influence sur une population de douze mille âmes environ. Moscheh encourage leurs efforts pour civiliser ses sujets déjà il s'habille à l'européenne, et s'est fait construire une maison à la place de la hutte qu'il habitait autrefois. Son fils Molapo a embrassé la religion chrétienne.

>> Les Bassoutos ne sont pas les aborigènes du pays qu'ils habitent maintenant ; ce n'est qu'en 1824 que Moscheh y établit sa résidence. Avant cette époque, il avait avec sa tribu habité un peu plus au nord des Maloutis; mais, expulsé du pays à la suite d'une guerre longue et désastreuse contre les Zoulas, il vint s'établir avec sa nation sur la colline de Thaba-Bossiou, dont l'escarpement offrait une défense naturelle. C'est une montagne isolée, de forme pentagone, haute d'environ quatre cents pieds, et offrant à son sommet un plateau d'environ trois quarts de lieue de tour, et dont l'abord est défendu par des rochers perpendiculaires. Les villes de Moscheh ainsi que celles de son père Mokachane sont sur le plateau même. Le pied de la montagne est couvert d'habitations, au centre desquelles s'élève la maison des missionnaires. En jetant les yeux sur les collines environnantes, on découvre vingt-deux villages, qui semblent autant de postes avancés destinés à prévenir toute surprise.

Novembre 1841. TOME IV.

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Le gouvernement des Bassoutos tient le milieu entre le protectorat patriarcal des Batlapis et l'absolutisme des chefs zoulas, c'est-à-dire qu'il règne moins de liberté à Bossiou qu'à Lattakou, et que le Bassouto jouit cependant de priviléges inconnus à l'esclave de Dingaan. Moscheh est le maître suprême du pays : il assigne à ses sujets les lieux qu'ils doivent habiter, et ils ne peuvent les quitter sans sa permission; dans certains cas, il dispose même de leur personne. S'agit-il d'envoyer des espions, d'entreprendre un travail public, il désigne les individus dont il a fait choix, et nul n'a le droit de protester. Toutes les disputes, tous les différends, sont jugés par lui en dernier ressort. La nation est divisée en villages, et ces villages obéissent à des chefs qui relèvent eux-mêmes de Moscheh. Dans les affaires importantes, celui-ci les réunit pour s'aider de leurs conseils, et dans les assemblées, chacun émet son avis librement et avec la plus grande franchise.

» Le dieu des Bechuanas, Morimo, est regardé par eux comme le génie du mal; mais ils le croient relégué dans le centre de la terre, où il s'occupe peu des mortels; de sorte qu'il est inutile de chercher à le fléchir par des prières. Ils s'en occupent donc fort peu, et les seules traces de culte que l'on trouve chez eux sont les sacrifices de bestiaux, qui ont lieu dans leurs cérémonies funèbres. Les amulettes mêmes, aux quelles les nègres ajoutent ordinairement tant de confiance, sont sans crédit chez eux, et ils ne les portent guère que par habitude. Leur conversion est donc

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moins difficile que celle des autres nations de l'Afrique, qui, imbues des superstitions les plus grossières, offrent presque toutes à leurs grossiers fétiches des troupeaux de victimes humaines. >>

La langue bechuana parlée par les Bassoutos l'est également par toutes les nombreuses tribus composant la grande nation des Bechuanas. Les voyageurs qui se sont le plus avancés dans l'intérieur du pays l'ont trouvée en usage aussi loin qu'ils ont pu pénétrer. M. Casalis prétend même qu'elle a beaucoup d'analogie avec la langue du Congo, et il s'appuie d'assez bonnes preuves. D'après les échantillons que l'auteur nous en donne, elle paraît claire et assez harmonieuse. Les mots les plus longs ne dépassent jamais quatre syllabes, et les plus courts en ont au moins deux ils sont formés de syllabes simples composées uniquement d'une consonne et d'une voyelle; aussi les indigènes ont-ils la plus grande peine à prononcer les mots hollandais, où les consonnes sont souvent fort multipliées. Les mots hals (cou), vleesch (viande), deviennent dans leur bouche halosi, velasi.

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Les substantifs de la langue bechuana sont indéclinables, et le pluriel se forme par le changement des préfixes ainsi, legeba, colombe, fait au pluriel mageba. Les verbes se modifient à chaque temps, mais non à chaque personne, qui n'est indiquée que par le pronom et par une particule placée entre celui-ci et le verbe. La syntaxe est aussi assez simple, et en général l'étude de cette langue ne paraît pas pré

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