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nard, Collé, l'ont, il est vrai, indiquée par quelques couplets; mais si on l'accepte comme œuvre de distraction, on ne l'a pas encore classée comme œuvre d'art. Dans le Nord, au contraire, c'est une littérature riche et ancienne. » Bellman a été un des poëtes les plus renommés par ses chansons à boire. Il était doué d'une grande facilité, d'un talent rare d'improvisateur; poëte et musicien, il trouvait en même temps la rime et la mélodie, il ne récitait pas ses vers, il les chantait. Bellman est peint avec fidélité; je puis l'attester, ayant eu plusieurs fois le plaisir de l'entendre. J'ai connu aussi plusieurs des auteurs dont il est question dans le livre dont je rends compte; ils ont tous cessé de vivre.

L'ouvrage de M. Marmier nous introduit dans une région qui était bien peu connue de nos littérateurs français. Rendons-lui grâce d'avoir traité habilement un sujet nouveau pour la plupart des Français.

Littérature et Voyages; par J.-J. Ampère. Paris 1833; 1. vol. in-8°. Chez Paulin.

C'est aussi du Nord et de sa littérature que M. Ampère s'est occupé dans le volume que nous avons sous les yeux. En partant de Berlin le 7 juillet 1827, il se dirigea vers la Poméranie; le 18, il s'embarqua; le lendemain, quand il s'éveilla, on lui dit: « Vous êtes en Suède. » Il s'élança sur ce rivage nouveau, tout était changé. « Une autre nature, une

autre langue, d'autres hommes! s'écrie le voyageur. j'avais devant mes yeux le spectacle neuf pour moi d'une ville suédoise, avec ses maisons de bois peintes de diverses couleurs. Le costume des payla race de leurs chevaux, la forme de leurs charrettes, tout était différent de ce que je voyais la veille. . . .; le ciel, hier si bleu, était pâle et terne, le temps me paraissait refroidi, peut-être par l'envie que j'avais de me sentir en Suède. »

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M. Ampère ne s'arrête que peu d'heures à Ystad. Il ignorait la langue du pays : il n'en résulta pour lui nul embarras, nul préjudice dans son voyage à travers la Scanie. « Il y a peu de pays, observe-t-il avec d'autres voyageurs, où l'on puisse se confier à la probité des classes inférieures autant qu'en Scandinavie. >>

Il passe le Sund, reste quelques jours à Copenhague, visite les savants et les établissements littéraires, monte sur un pyroscaphe, relâche à Gothembourg, visite la cascade de Trollhætta et le canal du Götha-Elv, reprend la mer et arrive à Christiania, il en admire le site remarquable, assiste à une séance de Stor-thing dont il a été question dans la revue du voyage de M. Marmier, et suit la même route que lui pour gagner Drontheim, après avoir fait une excursion à Kongsberg, ville célèbre par sa mine d'argent et située dans un désert; elle doit uniquement son existence à la mine; quand les produits de celle-ci ont baissé, il en est résulté la diminution et la misère de la population.

Décembre 1841. TOME IV.

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C'est dans le trajet des Alpes scandinaves que la nature norvégienne apparut à M. Ampère dans toute sa majesté. Il fallait l'intérêt de ce spectacle pour le dédommager des fatigues qu'il lui coûtait. Dans sa charrette découverte, il était exposé à la pluie, qui dura huit jours. Il en employa deux et demi à côtoyer le Miösen, grand lac, beaucoup plus long que large; cette forme et ses sinuosités le font ressembler à un large fleuve débordé entre de hautes montagnes.

« C'est la grandeur des distances, remarque M. Ampère, c'est l'étendue des lieux qui distinguent surtout ces régions des autres pays de montagnes que je connais, par exemple, de la Suisse. En Suisse, on passe d'une vallée à une autre, d'un canton à un autre canton; on peut commodément s'élever dans la même journée à diverses latitudes, visiter des populations différentes de mœurs, de costumes, de langage; mais en Norvége, on fait trente lieues sans quitter les bords du même lac, sans sortir du même district; on ne s'effraye point d'un détour de cinquante lieues pour voir une cascade; tel paysan fait, tous les dimanches, pour aller en poste entendre la messe à l'église la plus proche, et pour en revenir, plus de chemin qu'un habitant de l'Oberland n'en fait dans toute l'année. »>

Quand on pénètre dans le Gulbrandsdal, vallée de cinquante lieues, qui débouche dans le Micsen, l'aspect du pays change tout à coup, au lieu des pentes doucement inclinées qui bordent ce lac, on se trouve

d'abord au fond d'un précipice étroit, dominé de tous côtés par des sommets qu'on voit s'élever les uns au-dessus des autres, à mesure qu'on s'élève soi-même en serpentant le long de leurs bases.

La continuité de la pluie inspire à M. Ampère la réflexion qu'un jour terne et un ciel pluvieux ne vont pas mal à un paysage triste et sévère. Une lumière pâle, un ciel nébuleux composent avec la nature sombre des pins et la teinte grisâtre des rochers une harmonie douce et triste qui n'est pas sans charmes.

La description d'un gaard de Norvége fait connaître ce singulier groupe de bâtiments en bois, qui constitue les habitations de la campagne. M. Ampère le définit très-bien en l'appelant une maison décomposée. Ce gaard ne peut-il pas être considéré comme étant, l'origine de l'enclos nommé Cour dans la Normandie. Cela me paraît d'autant plus probable, que généralement une cour est isolée, et qu'on ne les voit guère réunies que le long des anciennes voies romaines.

On ne trouve pas l'opulence dans ces habitations, cependant on y remarque plus de saleté que de misère. La terre est bien peu fertile en Norvége, mais il y en a tant pour si peu d'hommes, et ils ont si peu de besoins. Du reste, un air de satisfaction et de fierté annonce chez le paysan l'absence du besoin et du souci.

M. Ampère franchit au milieu d'août le Dovrefield, et bientôt il aperçut la baie de Drontheim. « Ici,

dit-il, la mer est vraiment le triste océan du Nord: plus de mollesse dans les contours, plus de formes arrondies; des lignes droites, des rochers à pic, des écueils. A Christiania, une végétation abondante couvrait les îles et les rives, descendait jusqu'au sein des flots. Ici l'on est presque au terme de la végétation, la verdure est toujours belle, mais les arbres sont clair-semés, on les remarque, on les compte, on les regrette: les brumes mêmes sont plus épaisses, plus sombres; on se sent bien plus reculé, bien plus perdu dans les confins du monde vivant, vers les lointaines extrémités de l'univers. >> En effet, on est au delà du 63° degré de latitude boréale.

En quittant Drontheim, M. Ampère prit la route qui passe au nord de celle qu'a suivie M. Marmier, et qui n'était pas encore finie; quand on fut parvenu au point où elle cessait, on commença à chevaucher à travers les sapins dans un terrain marécageux, entremêlé çà et là de quelques rochers; des troncs d'arbres pourris embarrassaient souvent le chemin; il fallait il fallait passer des torrents à gué, les chevaux étaient forcés à chaque instant d'entrer jusqu'au poitrail dans des bourbiers, et alors aux prises avec les racines et les broussailless, il fallait qu'ils parvinssent à force d'adresse et de patience à débarrasser leurs pieds. Ils surmontèrent merveilleusement ces difficultés; toutefois ils s'abattirent sous les voyageurs dans les endroits les plus mauvais ; mais il n'en résultait d'autre inconvénient pour

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