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qui s'étend jusqu'à Guatemala, et qui, à cause du voisinage de la capitale, paraît être la partie la mieux cultivée de la république. En arrivant à Guatemala, M. Stephens trouva par bonheur une maison qui avait été passablement arrangée par M. de Witt, ancien chargé d'affaires des Etats-Unis, qui était mort dans le pays; une fois installé, il ne lui restait plus qu'à découvrir le gouvernement auprès duquel il était accrédité, ce qui n'était pas chose fa

cile.

Quand les colonies espagnoles de l'Amérique secouèrent le joug de la métropole, le royaume de Guatemala, après une courte union avec le Mexique, se proclama république indépendante et fédérative. Elle se composait de cinq États: Guatemala, San Salvador, Honduras, Nicaragua et Costa Rica. Le district de Quetzaltenango fut plus tard séparé de l'État de Guatemala et en forma un sixième; mais les habitants ne tardèrent pas à se diviser en deux grands partis, comme dans tout le reste de l'Amérique du Sud. M. Stephens les caractérise de la manière suivante :

« Le parti central est le parti aristocratique ou » servile, le parti fédéral est en même temps le parti » libéral et démocratique. Le premier voulait aug» menter l'influence du gouvernement central, le » second défendait le droit des États. Le parti cen»tral avait pour lui le clergé et les anciennes fa» milles. Les fédéraux étaient, au contraire, des >> hommes instruits et énergiques, qui voulaient se

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» couer le joug de la superstition catholique. Quand >> les uns voulaient défendre les anciens usages et s'opposaient à toutes les améliorations, les autres » voulaient détruire d'un seul coup tous les abus; >> aussi, dès la troisième session du congrès, les >> dissensions éclatèrent, et les députés de San Sal>> vador, le plus libéral de tous les États, crurent » devoir se retirer. »

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Il est facile de s'apercevoir que M. Stephens appartient à ce que l'on appelle aux États-Unis le parti démocrate, et qu'il juge les choses au point de vue de son pays, sans remarquer que les habitants de l'Amérique espagnole sont les gens du monde les moins propres au self-government, et qu'ils seront toujours gouvernés d'une manière absolue, quelle que soit la forme de leur constitution. Quant à nous qui avons aussi visité l'Amérique du Sud, nous avons toujours regardé la lutte des fédéralistes contre les centralistes comme la lutte de la barbarie contre la civilisation, et de l'homme de couleur contre le blanc. Les provinces sont cent fois plus sauvages que la capitale, quelque peu éclairée qu'elle soit. Ces hommes éclairés et énergiques, dont parle M. Stephens, sont des Rosas et des Carreras, indiens ou métis qui savent à peine signer leur nom. La libéralité de leur gouvernement consiste à faire fusiller quiconque a le malheur de leur déplaire ou de posséder quelque chose qui soit à leur convenance. Les centralistes, au contraire, sont, il est vrai, souvent peu éclairés, et se traînent dans d'an

ciens errements; mais, au moins, ils cherchent à maintenir l'ordre et la paix, qui n'ont régné quelque peu dans ces malheureux pays que pendant leur administration.

La retraite des députés de San Salvador fut suivie bientôt après de l'assassinat de Flores, vice-président de la république, qui appartenait au même parti, et fut massacré, à l'instigation des moines, dans la cathédrale même de Quetzaltenango. L'État de San Salvador prit les armes pour le venger, et, le 16 mars 1827, son armée parut devant les portes de la capitale ; mais elle fut repoussée après avoir éprouvé une perte considérable. Cependant, après une guerre de deux ans, cette armée, commandée par le général Morazan, qui était alors à la tête du parti libéral, remporta une victoire complète sur les centralistes et entra en triomphe dans Guatemala. Tous les chefs du parti opposé furent bannis, et le général Morazan, élu en 1831 président de la république et réélu en 1835, gouverna le pays pen

dant huit ans.

Cependant les exilés étaient peu à peu rentrés dans le pays et avaient commencé à y reprendre de l'influence. Dans le mois de mai qui avait précédé l'arrivée de M. Stephens, les pouvoirs du président, des sénateurs et des députés à la seconde chambre du congrès étaient expirés, sans que l'on eût procédé à de nouvelles élections. Les États de San Salvador et de Quetzaltenango étaient les seuls qui défendissent le gouvernement fédéral, dont les quatre

autres s'étaient déclarés indépendants. Morazan, qui commandait leurs troupes, avait défait Ferrera, général du parti contraire, et occupait militairement l'État de Honduras. Les États étaient donc trois contre trois, position très-embarrassante pour notre diplomate, puisqu'il n'avait pas même la ressource de s'adresser au gouvernement de fait, sans s'inquiéter du reste.

A Guatemala on était unanime en faveur du parti central. Il est vrai que, dans cet heureux pays et dans les républiques voisines, on a adopté, pour établir un accord si touchant, un moyen renouvelé des anciennes diètes de Pologne; on massacre ou l'on exile tous ceux qui manifestent la moindre opposition au gouvernement existant pour le moment. Or, dans le mois de mars précédent, Carrera, dont nous parlerons plus loin, était entré dans la ville, à la tête d'une bande d'Indiens, avait chassé Salazar, gouverneur de l'Etat, et frappant avant le lever du soleil à la porte de Rivera Paz, lui avait annoncé qu'il était le chef de l'État, et viva la Constitucion!

M. Stephens, ne voulant ni reconnaître officiellement le gouvernement existant ni paraître s'y refuser, trouva un véritable expédient de yankee; il lui adressa une plainte contre l'officier et l'alcalde qui l'avaient arrêté à Comotan: il ne put obtenir que des excuses et une promesse de punir les coupables; mais il est vrai de dire que, dans l'état d'anarchie où se trouvait le pays, il n'était guère possible de lui offrir autre chose.

Carrera, qui était alors maître absolu du pays, quoique Rivera Paz en fût le chef nominal, est un Indien natif d'un des faubourgs de Guatemala; en 1829, il était tambour dans le régiment du colonel Aycinena, et, après la victoire du parti fédéral, il se retira dans le village de Matasquintla, où il se prépara à sa grandeur future en gardant les pourceaux. Le clergé exploita habilement les craintes d'empoisonnement qui se répandirent parmi les Indiens à l'approche du choléra, en 1837, et leur persuada que les blancs avaient résolu de les anéantir. Ils se levèrent en masse de tous côtés, et Carrera se mit à la tête de ceux de Matasquintla, en criant : Vive la religion et mort aux étrangers! car il est à remarquer que ces derniers jouent, dans l'Amérique espagnole, le rôle du bouc émissaire. S'il arrive une épidémie, un tremblement de terre ou une révolution: Mort aux étrangers! voilà le remède que trouve la population.

Carrera se trouva bientôt àla tête d'un nombre considérable d'Indiens, et parcourut la campagne en pil. lant les voyageurs et en massacrant tous les employés du gouvernement qui tombaient entre ses mains. Malheureusement pour le parti fédéraliste, ses chefs étaient loin d'être d'accord. Les soldats se révoltèrent et massacrèrent leurs officiers. Barundia, ennemi personnel de Galvez, en profita pour renverser le gouvernement, et demanda secours à Carrera, qui ne tarda pas à arriver à la tête de ses bandes, auxquelles s'étaient joints tous les vagabonds et tous

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