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les bandits du pays. Il faut cependant lui rendre la justice de reconnaître qu'il empêcha le pillage, qui était imminent, et se contenta de demander mille mousquets et dix mille piastres pour les siens; mille piastres, et, singulière idée, un brevet de lieutenantcolonel pour lui. Quand on lui eut remis tout ce qu'il demandait, ainsi qu'une pièce de canon qu'il exigea de plus, il évacua la ville, à la grande joie des habitants. Barundia et Valenzuela furent mis à la tête du gouvernement; mais, au bout de quelques jours, Carrera, qui s'était retiré à Matasquintla, leur fit dire qu'il avait appris qu'on avait mal parlé de lui dans le congrès, et qu'il ne tarderait pas à venir châtier la ville.

Les habitants, qui se préparaient déjà à prendre la fuite avec ce qu'ils possédaient de plus précieux, apprirent avec des transports de joie que le président Morazan arrivait de San Salvador à la tête de 1,500 hommes. Après bien des difficultés ridicules sur le plus ou moins de droit que le président de la république avait de se mêler des affaires particulières d'un État, on finit par lui accorder le pouvoir d'agir selon les circonstances. Morazan se décida alors à envoyer Barundia au chef indien, pour tâcher de l'amener à un traité; mais celui-ci se montra si extravagant dans ses prétentions, qu'on perdit bientôt tout espoir d'arrangement.

Dans l'intérieur de la capitale, les différents partis qui divisaient les fédéralistes, et qui se détestaient peut-être plus encore entre eux qu'ils ne haïssaient

les centralistes, envoyaient députation sur députation à Morazan, dont ils espéraient se faire un allié, pour l'engager à entrer dans la ville à la tête de ses troupes. Celui-ci fit preuve de modération après avoir repoussé Carrera, et se remit en marche pour San Salvador, laissant les Guatémaliens, plus divisés que jamais, régler leurs affaires intérieures comme ils l'entendraient.

A peine Morazan s'était-il éloigné, que Carrera rassembla ses forces et menaça de nouveau la capitale, de sorte qu'on fut obligé de rappeler en toute hâte le président de la république, qui attaqua Carrera près de Villanueva, lui tua 450 hommes, et le mit dans une déroute complète. Morazan fut proclamé dictateur; mais, malgré ses efforts, il ne put réussir à anéantir les cachurecos. C'est ainsi qu'on nommait les Indiens révoltés; car, divisés en petites bandes, ils s'étaient réfugiés dans des montagnes inaccessibles. Pendant plus de trois mois, Carrera, constamment battu dans divers engagements, réussit toujours à s'échapper.

Au bout de ce temps, Morazan, croyant la capitale en sûreté, retourna. à San-Salvador. Les états de Honduras et de Costa-Rica, qui venaient de se déclarer indépendants, attirèrent toute son attention de ce côté, et le parti centraliste de Guatemala en profita pour s'emparer du pouvoir, en appelant Carrera à son aide. L'effroi qu'il inspirait était tel, que personne n'osa faire la moindre résistance. Les fédéralistes prirent la fuite dans toutes les directions,

Octobre 1841. TOME IV.

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emportant ou cachant tout ce qu'ils possédaient de précieux. Les Indiens occupèrent la ville, et les centralistes convoquèrent une assemblée nationale, dans laquelle ils se hâtèrent d'abolir toutes les lois qui avaient été promulguées par le parti libéral. Mais quoique Rivera Paz eût été proclamé de nouveau président de l'État, le chef indien n'en était pas moins le véritable chef du gouvernement et le maître absolu du pays, quoiqu'il ne prît que le titre de brigadier général aux ordres de l'assemblée législative.

Ne sachant pas trop s'il devait ou non reconnaître cegouvernement qui pouvait être renversé le lendemain, M. Stephens chercha à gagner du temps et s'amusa à faire diverses excursions. Il visita Mixco, beau village indien, et le but ordinaire des promenades des habitants de la capitale, ainsi que les ruines de l'ancienne Guatemala, qui fut détruite par un tremblement de terre et complétement abandonnée, en vertu d'un décret royal de 1777, comme étant trop près du volcan et dans une situation dangereuse. Deux volcans dominent cette ville, l'un connu sous le nom de volcan de Fuego, et l'autre sous celui de volcan de Agua, parce que dans différentes occasions il a vomi des torrents d'eau.

Notre voyageur résolut de gravir ce dernier, entreprise, qu'il accomplit non sans de grandes difficultés. La partie inférieure de la montagne est couverte d'arbres dont le feuillage est si épais que les rayons ne peuvent y pénètrer et que le sol, inondé pendant la saison des pluies, ne sèche jamais et

n'offre qu'un immense bourbier, M. Stephens, pour ne pas enfoncer, fut obligé de s'entourer le corps d'une corde dont deux Indiens, qui marchaient devant et derrière, tenaient les deux extrémités et le tiraient ainsi des mauvais pas. En sortant de cette forêt, il fallut traverser des cendres si épaises, que la marche devint plus pénible et plus difficile encore. On peut donc juger de la contrariété qu'il éprouva en arrivant au sommet, qu'il croyait avoir gravi le premier, de découvrir une inscription gravée sur le roc et destinée à annoncer à la postérité la plus reculée, que MM. Idvert de Saint-Pétersbourg, Page d'Angleterre, et Croskey de Philadelphie, s'étaient immortalisés en buvant dans cet endroit quelques bouteilles de vin de Champagne.

Ce volcan est éteint depuis longtemps, et la tradition ne rapporte aucune de ses éruptions. Il paraît même que le cratère était devenu un petit lac, et que le déluge d'eau dont il inonda les campagnes environnantes ainsi que la ville que les Espagnols venaient de construire, fut simplement l'effet d'un éboulement causé par le poids de l'eau que les bords amincis du cratère ne pouvaient plus soutenir. Du haut de la montagne on aperçoit, dit-on, les deux villes de Guatemala, ancien et nouveau, trente-deux villages indiens et l'océan Pacifique; mais l'horizon était si couvert de brouillards, que notre diplomate ne vit rien, rien que l'inscription fatale qui devait anéantir ses rêves de gloire. Cette aventure nous rappelle involontairement le sort de cet Anglais qui,

après avoir gravi le Pieter - Boot au risque de se rompre vingt fois le cou, découvrit dans une fissure de rocher une carte de visite.

Au milieu de ces excursions et de plusieurs autres que nous laissons de côté parce qu'elles offrent moins d'intérêt, M. Stephens n'oubliait pas de s'enquérir de temps en temps où était le gouvernement. A Guatemala on assurait que le gouvernement fédéral n'existait plus, et cependant on n'y parlait qu'en tremblant de l'approche de Morazan, qui assemblait une armée à San-Salvador. Aussi se crut-il obligé de recommencer ses recherches, afin de pouvoir dire positivement, à son retour aux États-Unis, de la manière la plus légale cepi corpus ou non est inventus.

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Voyant donc qu'il n'y avait pas de chance de trouver à Guatemala autre chose qu'un gouvernement local, il résolut de se rendre à San-Salvador pour voir s'il y serait plus heureux. Il demanda et obtint non sans difficulté ses passe-ports, et profita des offres que lui fit M. Denouvelle, capitaine d'un navire marchand français qui se trouvait dans le port d'Istapa et était sur le point de mettre à la voile pour San-Salvador. T.-C.

(La suite au prochain numéro )

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